C’est à double titre que je vous écris aujourd’hui.
D’abord en tant que chercheuse sur le changement climatique, pour vous faire part d’un constat sans appel : le réchauffement climatique nous place face au défi le plus important de notre existence, tant il conditionne notre futur commun sur Terre.
Chers Camarades,
Ce réchauffement, qui est aujourd’hui de + 1,2°C par rapport à l’ère préindustrielle, montre déjà de lourdes conséquences sur les écosystèmes, les populations et de nombreux secteurs, en particulier l’agriculture. La recherche à son plus haut niveau international nous permet aussi d’attribuer sans équivoque le réchauffement aux activités humaines, et précisément à nos émissions de gaz à effet de serre.
Jamais de son histoire l’être humain n’a vécu dans une atmosphère aussi carbonée.
Enfin, nous sommes aujourd’hui capables de projeter les risques futurs liés à la poursuite du réchauffement, et ces derniers sont tels que nous devons tout faire pour contenir la hausse de la température à + 1,5 °C. Cet objectif reste atteignable, mais à condition de réduire à zéro nos émissions nettes de dioxyde de carbone d’ici 2050. Et 30 ans, c’est très court pour réussir.
Faut-il pour autant céder au catastrophisme et baisser les bras ? Bien sûr que non. J’en viens donc à la deuxième « casquette » avec laquelle je vous écris : celle de diplômée des Ponts et de directrice de recherche au laboratoire CIRED, et par là-même actrice et témoin des multiples forces mobilisées par notre École pour accélérer les transformations nécessaires à l’atteinte de cet objectif.
À ce titre, j’accueille avec joie l’engagement de la Fondation des Ponts à créer un fonds dédié à la transition écologique, et j’espère que nous serons nombreux, parmi les déjà donatrices et donateurs, et parmi tous nos autres Camarades, à lui apporter notre soutien.
Car la communauté des Ponts a un rôle majeur à jouer face à l’urgence climatique.
En effet, cette urgence appelle deux types d’actions aussi nécessaires qu’indissociables. D’une part, réduire au plus faible niveau possible les émissions de gaz à effet de serre et, d’autre part, diminuer la vulnérabilité des écosystèmes et des populations au changement climatique inéluctable. Cela suppose de transformer en profondeur, rapidement et durablement, l’ensemble de nos systèmes : énergie, industrie, transports, urbanisme, bâtiment, finance…
Or, vous le découvrirez plus en détail dans le document ci-joint, l’enseignement, la recherche, l’innovation des Ponts, dont la vocation est de construire les mondes de demain, sont au cœur de ces transformations. Ils n’en sont bien sûr pas les seuls leviers, mais des leviers fondamentaux.
Notre École a aussi, historiquement, la conscience de l’intérêt général et la culture de l’amélioration, de la remise en question, du changement. L’ingénieur des Ponts a toujours incarné cette volonté d’être au service de la société, et peut-être plus encore la nouvelle génération d’élèves, dont l’appétence pour le sujet de la transition écologique, et le désir d’action, n’ont jamais été si importants.
Je pense donc qu’il est de notre devoir à toutes et tous de les soutenir, de les accompagner, de les inspirer, par nos actes au sein des secteurs clés dans lesquels beaucoup d’entre nous ont des postes à responsabilité, mais aussi par notre générosité.
Je terminerai enfin cette lettre par une note d’optimisme : les transformations auxquelles nous appelle l’urgence climatique ne sont pas des transformations tristes ! Repenser l’urbanisme et la mobilité pour construire des villes plus vertes, plus résilientes, plus agréables à vivre, c’est par exemple très joyeux.
Alors redoublons d’enthousiasme et d’énergie, et mobilisons-nous derrière notre École, ses élèves, ses chercheuses et chercheurs !
Je vous en remercie d’avance, avec toute mon amitié.
Céline Guivarch (IPEF 2005)
Économiste du changement climatique, directrice de recherche à l’École des Ponts, membre du Haut conseil pour le climat et autrice pour le 6e rapport du GIEC sur l’atténuation qui sera publié en mars 2022.